samedi 30 janvier 2016

Matrix, Andy et Lana Wachowski, 1999

Keanu Reeves et Lawrence Fishburne (si si, derrière les lunettes)

Comme beaucoup, j'ai vu Matrix, comme beaucoup j'ai adoré Matrix. Non seulement ce film joue avec nos yeux, mais il vient aussi titiller le cerveau là où ça l'amuse.

Pourquoi ? Parce que ce film est plein de clins d'œil. Alice au pays des merveilles par exemple, l'une des références les plus explicites : "As-tu déjà fait l'un de ces rêves, Néo, qui semblent plus vrais que la réalité?". Néo qui suit le lapin blanc et qui, tombé dans son terrier, se retrouve dans un monde cauchemardesque et pourtant alléchant de nouveauté et de possibilités... Mais le modèle le plus sérieux et le plus subtil reste celui qui inspire aux créateurs le principe de la Matrice. Comme nous l'apprenons de la bouche de Morpheus, la matrice a été créée par les machines pour asservir les hommes à leur avantage. Ces derniers restent branchés en permanence pour leur fournir de l'énergie et sans même s'en rendre compte : les machines substituent à leur véritable regard un monde virtuel dans lequel ils évoluent et croient vivre indépendamment, en hommes libres.


Carrie-Ann Moss

Là librement, mon petit cerveau de jeune fille perspicace a eu une légère impression de déjà vu et m'a directement axée sur Schopenhauer, ce philosophe qui expose ses principes métaphysiques dans Le monde comme volonté et comme représentation (1818). Laissez-moi vous expliquer: il était une fois, un philosophe des plus pessimistes qui se libéra des idées néo-platoniciennes qui sévissaient depuis peu dans le monde philosophique (sans pour autant se détacher de son système d'organisation des phénomènes, mais là, on entre dans un sujet dans lequel mon peu de maîtrise me rendrait ridicule). Pour lui, Dieu n'existe pas, ni l'Un, ni le Bien-le Beau-le Vrai ou tout autre principe premier duquel découle le monde dans lequel nous vivons. Seul se trouve le mal, le néant, ce qu'il appelle le "Vouloir-vivre". Ce même principe se sert des hommes pour évoluer et pour s'épandre. Ainsi il crée une illusion pour les asservir, cette illusion est ce même monde dans lequel nous vivons. Cela ne vous rappelle donc rien à vous aussi? Ce Vouloir-vire, ne vous fait-il pas penser aux machines qui ont pris le contrôle des hommes ? Et ces pauvres êtres humains n'évoluent-ils pas dans un monde illusoire ? De plus, dans l'excellent film qu'est Matrix, les hommes sont maintenus dans cet état afin de leur fournir de l'énergie, et donc servir les machines : comme nous l'explique Schopenhauer, le désir sexuel par exemple n'est rien d'autre qu'un moyen du Vouloir-vivre pour nous asservir, il nous est imposé afin de perpétuer l'espèce: pour preuve, il n'est jamais totalement assouvi et revient toujours...


Matrix pourrait être un film relativement pessimiste et au cours de ces deux heures de plaisir, nous plongeons dans le cauchemar en même temps que Néo. Mais à la différence de Schopenhauer, les auteurs ont créé un aboutissement optimiste à l'histoire, un espoir de salut que le philosophe n'a pas envisagé en son temps.


Carrie-Ann Moss


Matrix est ainsi un excellent film qui plaira aussi bien à ceux qui aiment les effets spéciaux, qu'à ceux qui aiment se prendre un peu la tête... inutilement ? Non justement...

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